Nous avons reçu ce texte par mail et avons estimé important de le partager. Il met en lumière les dysfonctionnements liés à la mise en place prochaine du nouveau système de remboursement des psychothérapeutes. Ce dernier vise en effet à accélérer la prise en charge des personnes qui en ont besoin mais semble, paradoxalement, la pénaliser.
« La psychothérapie déléguée relève d’un système qui date de 40 ans et qu’on veut changer en 6 mois. Ce changement implique un bouleversement profond sur la scène psychiatrique, puisque des milliers de patients (toute la Suisse) actuellement pris en charge par des psychologues délégués en formation (répondant à des critères de délégation) dans des cabinets de psychiatres et de pédopsychiatres vont se retrouver sans soutien thérapeutique. En effet, en 6 mois, du 1er juillet au 31 décembre 2022, on va pousser les patients à quitter les cabinets pour aller chercher des suivis chez d’autres psychologues psychothérapeutes nouvellement autorisés à facturer à charge de la Lamal, sachant qu’il n’est pas garanti d’avoir une place auprès d’eux, puisque le système sanitaire psychiatrique est déjà insuffisamment pourvu. Autrement dit, on autorise les psychologues à bientôt pratiquer la psychothérapie et à facturer à charge de l’assurance maladie avec comme motif impérieux de ne plus laisser les personnes en détresse attendre des places disponibles auprès des seuls psychiatres et pédopsychiatres, et, paradoxalement, une grande majorité de ces mêmes patients vont se retrouver sans suivi thérapeutique puisqu’ils sont en grande majorité pris en charge, jusque-là, par des psychothérapeutes en formation et en délégation et devant cesser abruptement leurs suivis de par l’entrée en vigueur de la psychothérapie psychologique que seuls les ainés psychologues psychothérapeutes pourront pratiquer. Le nombre des patients se retrouvant en rupture de leurs suivis sera très important. Ce nombre ne pourra pas être absorbé par les quelques psychothérapeutes qui pourront facturer à charge de l’assurance maladie.
De plus, savez-vous que déjà actuellement, sachant que le modèle de délégation va s’arrêter entre le 1er juillet jusqu’au plus tard le 31 décembre 2022, des parents, des familles, des patients, contactent depuis le mois de mars 2022 des cabinets psychiatriques et surtout pédopsychiatriques et s’entendent dire que les cabinets en question ne prennent plus du tout de nouveaux patients jusqu’au début de l’année prochaine, soit en janvier 2023, soit 9 mois d’attente pour accéder à un premier rendez-vous !!
Est-ce une réelle avancée pour les soins psychiques que de démanteler tout ? Et dire que l’on prétend changer de modèle de fonctionnement précisément pour répondre aux besoins accrus en psychiatrie. Il y a actuellement du flottement et de la confusion dans ces cabinets. Les psychologues en formation de psychothérapie (répondant aux critères de délégation) sont sommés d’aller trouver des places uniquement en institutions psychiatriques pour que leurs formations soient reconnues et pour qu’ils puissent facturer en étant les psychothérapeutes délégués d’une institution psychiatrique. Mais là bien-sûr on n’utilise plus le mot délégation, puisqu’elle est censée avoir été abolie par la nouvelle loi.
Depuis 40 ans et jusqu’actuellement, les formations des futurs psychothérapeutes étaient supervisées au sein des institutions psychiatriques et dans les cabinets privés. Dès juillet 2022, un laps de temps dérisoire pour s’organiser et remanier les choses pour assurer concrètement et en toute sécurité les suivis des patients, tout doit s’arrêter dans les cabinets : les suivis en cours et cela concerne des centaines et des centaines de psychothérapeutes en formation s’occupant de milliers de patients psychiatriques de toute la Suisse. Ces psychothérapeutes en formation dans les cabinets de psychiatres cherchent alors, à tout prix, à avoir une place dans les institutions psychiatriques qui ne peuvent tout de même pas absorber toutes les demandes de travail.
Par ailleurs, nous remarquons que ces discussions, tractations et décisions ont lieu à Berne entre des politiciens et des associations de professionnels en vase clos, et il n’est aucunement tenu compte du patient psychiatrique qui va errer au niveau de ses soins, car les associations de patients ne sont guère conviées à leurs réunions.
Ainsi pour résumer, d’une part on va arrêter le modèle de la psychothérapie déléguée, et donc les patients en psychiatrie et surtout en pédopsychiatrie seront obligés d’aller frapper à d’autres portes qui ne sont en réalité pas autant nombreuses que cela, et d’autre part, le milieu psychiatrique médical et les psychothérapeutes installés bouleversés par ces remaniements expéditifs, insuffisamment anticipés et préparés avec des dispositions transitoires d’une durée dérisoire de 6 mois, et qui ne seront pas à notre sens pour le bien du patient, refusent d’ores et déjà depuis le mois de mars 2022, de nouveaux cas !!! Une question fondamentale se pose : chez qui doivent aller ces nouveaux patients qui vont attendre 9 mois et les patients en cours de suivi qui vont perdre leurs psychothérapeutes de référence parce qu’en formation dans les cabinets privés, alors que les demandes explosent ? Les cabinets sont actuellement réticents à accepter de nouvelles demandes de suivi puisqu’ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés et les modalités d’exercice de cette psychothérapie psychologique ne sont pas du tout claires et pour le citoyen lambda et pour le psychiatre, ainsi que pour les psychologues. Par qui seront pris en charge les patients ? Au bout de quels délais ? Surtout que les demandes de suivi psychiatrique explosent, et ceci est dû aux séquelles de la pandémie et à l’éclosion de la guerre en Ukraine.
Nous remarquons, nous patients, que les autorités à Berne n’ont pas avisé les médias, ni les patients. Tout se passe entre les décideurs, dans les salons feutrés de Berne, qui prennent des décisions qui vont avoir des conséquences sur le bien-être psychique des gens sans même les informer.
Par notre présent message, nous voulions, nous parents d’un jeune patient suivi au sein d’un cabinet privé par une psychothérapeute déléguée en formation, vous faire part de notre extrême inquiétude de ce qui est en train d’être annoncé comme une future errance pour notre enfant et vous prions de faire la lumière sur ce qui va réellement se passer pour le patient psychiatrique dès juillet 2022, date qui est bientôt là et dont on parle très peu dans les médias. »