Jurisprudence | Droit du travail

Licenciement immédiat pour justes motifs : article 337 al. 1 CO

Résumé Sieur A a travaillé comme serveur depuis 2008. Il a subi de façon régulière, devant les clients, un comportement inutilement agressif, dépréciatif et même insultant de la part de son employeur, qui a ainsi porté une atteinte grave à sa personnalité. Il est établi, par un rapport d’expertise psycho-judiciaire, que le mauvais état de santé de Sieur A peut être attribué à son vécu sur le lieu de travail. Or, le 7 juillet 2011 l’employeur a interdit à Sieur A  de prendre ses vacances à partir du 9 juillet : pris d’une crise d’angoisse et de panique, dans un grand état d’énervement, Sieur A  a brisé de la vaisselle et bousculé l’employeuse, la projetant au sol, ce qui lui occasionna des égratignures superficielles. L’employeur a aussitôt notifié à Sieur A son licenciement immédiat pour justes motifs, selon l’article 337 al. 1 CO. Le Tribunal fédéral estime que la gravité de l’infraction commise par Sieur A ne peut pas justifier, à elle seule,  un licenciement immédiat. Il faut considérer l’ensemble des circonstances parmi lesquelles figure également le comportement de l’employeur qui peut se révéler à l’origine d’une situation de tension pouvant conduire un employé à violer gravement son devoir de fidélité. En l’espèce, l’agression du 7 juillet a été provoquée par le comportement de l’employeur sur le lieu de travail. La perte de maîtrise de l’employé, déclenchée par le refus de l’employeur d’accorder des vacances, trouve son origine dans le mauvais état de santé du travailleur causé exclusivement par le mobbing (sur la définition du mobbing voir 4A_32/2010 du 17.05.2010) dont il a été victime pendant presque une année. Dans ces conditions, le licenciement immédiat n’est pas justifié. En outre, une indemnité pour tort moral de 5’000 CHF est octroyée à Sieur A en réparation des souffrances psychologiques subies. Commentaire Le Tribunal fédéral reconnaît que des conditions de travail portant atteinte à la personnalité du travailleur peuvent entraîner une telle fragilisation de sa santé psychique qu’on ne saurait lui tenir rigueur de perdre ses nerfs en violation de son devoir de fidélité. Cette jurisprudence est en phase avec la réalité vécue sur les lieux de travail. Il est à souhaiter que, dans la foulée, le lien évident entre la souffrance au travail et le risque d’invalidité qu’elle entraîne devienne, lui aussi, une réalité reconnue par les organes compétents. Références 4A_60/2014 du 22 juillet 2014 paru à la SJ 2014 I 481